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(\,n(\,rck<^-jfriŸY\^itiViSŸy^e^
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Anti-ci\^ili$(\tipn
Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
Tl^^te^ <(e5 fM.A^ttère5
Nous sommes arrivés à l'ére de tous les
dangers. Jamais l'être humain n'aura été
aussi proche de l'extinction, ou pire, de la
déshumanisation. Jamais la planète et tous
les écosystèmes qui la composent n'auront
été aussi menacés.
La convergence des crises (climatique,
énergétique, halieutique, environ-
nementale, santé publique, économique,
sociale) est telle que certains en voient les
signes de la fin de notre civilisation.
Face à ces dangers, les gouvernements,
mais aussi les individus, se contentent de
perfuser le système ou de promouvoir une
croissance verte ou un développement
durable. Mais il y a encore pire, les
humains se résignent, ils acceptent ce
dénouement comme une fatalité due aux
tares de l'humanité; ou alors ils rêvent de
révolutions technologiques qui vont
résoudre tous nos problèmes. Ils acceptent
le nucléaire ou les OGM car c'est d'eux que
dépend le futur de notre si belle
civilisation.
Il nous parait important de clarifier et de
démythifier un certain nombre de points:
l'être humain n'est pas maudit, la
civilisation n'est pas la meilleure façon de
vivre, la technologie n'est pas neutre,
l'agriculture n'est pas la panacée.
Nous voulons donc offrir à nos lecteurs des
nouveaux points de vue, une critique
radicale, une mise à nu de certains mythes,
mais surtout de nouvelles perspectives
Editorial 3
Table des matières 3
Impressum 3
Petite histoire humaine 4
Définition de la civilisation 6
Un mal nommé civilisation - 1 7
Réensauvagement 10
Moi, TERRE, écoutez-moi 12
De la neutralité de la technologie 13
Info, annonces : urscumug@riseup.net
Blog : http://anarchieverte.ch40s.net
Forum : http://vertetnoir.xooit.fr
Images : Anaryax
Version papier disponible pour les
prisonniers, pour les abonnés ou sur
demande spéciale, contactez-nous.
- 3 -
Bonne lecture.
Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
PKTITK niSTOIRK HUMAINK
Voici une petite histoire édifiante de l'être humain, des
jours anciens aux prochaines décennies. Par Mouton Sauvage,
janvier 2008
AGK »’OK
Depuis quelques millions d’années, des
hominidés au cerveau développé ont eu pas
mal de succès sous diverses appellations:
pithécanthrope, Neandertal, Cro-Magnon,
etc. Les versions modernes ont vécu
plusieurs dizaines de milliers d’années, voir
centaines de milliers pour les Neandertal,
en menant une vie tranquille de
chasseur-cueilleur.
RÉVOLUTION ACKICOLK
Il y a 12-13 mille ans, certains ont
commencé à se sédentariser et à dépendre
de plus en plus de l’agriculture. Cela a
produit des surplus de nourriture, qui a
permis une expansion de la
population, qui a permis de produire
encore plus de surplus, etc. C’est allé de
pair avec une spécialisation du travail, la
hiérarchisation de la société, le patriarcat
et les inégalités. La nourriture fut mise
sous clé et il fallut se mettre à travailler
pour manger. Les plantes, les animaux et
les humains furent domestiqués.
VALSK mis KMPIKKS
Les tribus sont devenues des chefferies,
puis des royaumes, puis des empires qui
ont assimilé ou détruit leurs voisins. Cette
nouvelle façon de vivre n’était pas aussi
pérenne ni aussi satisfaisante que la
précédente, l’Histoire est parsemée de
vestiges d’empires. Beaucoup de
peuples ont disparu sans laisser de traces.
Les raisons sont diverses: guerres avec un
voisin, destruction de l’environnement,
abandon des cités. A ce jour, presque tout
le monde a été assimilé ou détruit.
UONSOMMATION »IJ UAPII’AL
Ce processus d’expansion rapide a été
rendu possible par l’utilisation du capital
ressource-énergie: fertilité dans le sol,
biodiversité, métaux, bois, charbon,
pétrole, uranium, etc. Même l’utilisation
de ressources renouvelables est
généralement faite plus rapidement que le
taux de renouvellement, c’est ainsi que les
forêts précèdent les civilisations et les
déserts les suivent.
UKLIUIONS
Il y a plus ou moins deux mille ans, les
religions du salut, celles qui sauvent
(bouddhisme, hindouisme, christianisme,
islam), se sont développées pour soulager
et/ou justifier cette incroyable violence
infligée aux humains, aux animaux et à la
nature. Actuellement, le libéralisme
économique et la foi en les techno sciences
ont remplacé partiellement ces religions,
dans le même but: nous donner espoir et
nous faire supporter l’insoutenable.
SURCIIAUFFli:
Depuis quelques décennies, les humains
ont, chaque année, consommé, brûlé et
pollué plus que ce que la planète est
capable de fournir ou d’assimiler. Nous en
sommes au stade de la détérioration
irréversible. Il n’y a qu’un mot pour
résumer cette convergence de crises
multisectorielles: surchauffe.
FFFONRUFMFNT
Le dogme de la croissance sans fin nous
force à consommer, à nous endetter,
utiliser des ressources et polluer de façon
exponentielle. Depuis 10-12 mille ans, des
gens prédisent que le système n’est pas
soutenable et qu’il va s’effondrer. Ces gens
Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
ont eu raison, l’histoire le prouve. Notre
civilisation mondiale va également
s’effondrer, dans pas longtemps car nous
sommes au siècle de la vitesse.
ACITIJUS
Les gens qui font que ce système perdure
depuis plusieurs millénaires sont les
dirigeants, l’élite, la noblesse, les rois, les
hyper-riches: une minorité. Les moutons
écervelés et domestiqués qui constituent la
classe moyenne ne rêvent que de les imiter
et sont terrorisés à l’idée de tomber plus
bas. Les autres sont des esclaves.
RÉVOLUTIONS
Les révolutions n’ont généralement pas eu
d’autres buts que d’effectuer des rotations
au sommet de la hiérarchie: remplacer un
chef par un autre, des nobles par des
fonctionnaires. Les prisons survivent
aux révolutions. Les pauvres sont
toujours aussi pauvres. Les démocraties
donnent l’illusion au peuple de contrôler
son destin.
»IJ PAIN KT mis JKIJX
Pendant ce temps, tout est fait pour que la
masse servile ne relève pas la tête, on la
noie dans une masse d’information futiles,
on veille à ce qu’elle dispose des derniers
gadgets et que les divertissements ne
perdent pas d’intérêt. Les antidépresseurs
viennent au secours de ceux qui ne le
supportent plus. Le suicide paraît être la
seule porte de sortie.
UIS AMRIJLANCIKKS
Plusieurs se sont levés pour atténuer les
peines, soigner les dégâts, freiner la
machine dévorante. Ils ont proposé de
nouvelles lois, ont manifesté, ont sacrifié
leur vie, ont imposé de nouvelles
politiques, mais cela est vain: le système
en ressort à chaque fois intact,
quand il n’est pas encore renforcé. La
justice crée l’injustice, le système de santé
rend malade, l’éducation abruti. Triste
résultat malgré toutes les “améliorations”
qu’on y amène sans cesse.
SORTIR RU PIÉOK
La question fondamentale est maintenant
de savoir comment nous allons sortir de ce
piège, éviter d’être asphyxiés par nos
déjections ou être nettoyés par les élites.
Comment sortir de la cage souvent dorée ?
Comment échapper à tout l’appareil qui
veut nous faire réintégrer notre niche ?
Comment survivre dans l’en-dehors ?
RK'rOIJR AUX UAVKRNKS
Il n’est pas possible de retourner dans les
cavernes ni de remonter sur les arbres. Les
cavernes contiennent maintenant des
déchets toxiques et les arbres ne sont plus
assez nombreux. Ce qui reste de nature est
bien incapable de nourrir 7 milliards de
chasseurs-cueilleurs. En puis, si nous
sommes si intelligents, nous devrions
pouvoir inventer un futur primitif
différent.
UUITTKR LA UIVILISA'ITON
On ne sait pas quel mode de vie nous est
favorable, nous l’avons oublié. Mais ce qui
est sûr, c’est qu’il faut que la
civilisation cesse, du moins telle que
nous la concevons. On ne peut la faire
tomber du jour au lendemain, mais c’est
un géant aux pieds d’argile, elle est
condamnée. On peut l’aider à tomber, mais
on peut aussi s’en éloigner, la vider de son
sang, notre sang. Il ne s’agit pas de faire
une révolution pour mettre une nouvelle
équipe à la place de l’ancienne, il s’agit de
faire une révolution culturelle individuelle.
Briser le tabou ultime “il n’y a rien de
mieux que la civilisation”. Cette révolution
est déjà en marche. Tout le monde peut la
faire: en disant non, en résistant, en
n’achetant pas, en connaissant son voisin,
en privilégiant le local, en faisant la paix
avec la nature, en découvrant la vraie
valeur des choses. Il y a mille manières.
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Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
IJTOPIKS
Je rêve d’un monde où les humains
revivraient en tribus hétérogènes,
égalitaires, et où le “travail” ne
consisterait qu’à assurer la subsistance et
la survie de tous ses membres. Un monde
où les moyens de subsistance seraient
fournis gratuitement par la nature. Un
monde où les états, les banques, les prisons
et les multinationales n’existeraient plus.
Un monde où chacun serait son
maître. Un monde où nous pourrions vivre
et ressentir de nos cinquante sens sans
artifices.
Ce monde a existé, ce monde est possible. Ce qu’il nous faut maintenant, c’est une
nouvelle VISION, le genre de vision qui a porté la révolution agricole, l’essor des grandes
religions ou la révolution industrielle.
DÉFINITION m IJI CIVILISATION
Une définition de la
traduction par Misko.
“Une civilisation est une culture -
c’est-à-dire, un ensemble d’histoires,
d’institutions, et d’artefacts - qui à
la fois mène à, et émerge de la
croissance de villes (civilisation, voir
civil; de civis, signifiant citoyen, du
Latin civitatis, signifiant cité-état),
avec les cités ou villes étant définies
afin de les distinguer des
campements, villages, et ainsi de
suite - comme étant des groupes de
personnes vivant de façon plus ou
moins permanente en un endroit et
en nombres assez élevés pour exiger
l’importation routinière de nourriture
et autres nécessités de la vie...”
par Derrick Jensen,
“...Les Villes exigent l’importation
(souvent forcée) de nourriture et
autres ressources. L’histoire de
n’importe quelle civilisation est
l’histoire de la montée de cités-états,
ce qui veut dire que c’est l’histoire
du pompage de ressources vers ces
centres (afin de les soutenir et de
causer leur croissance), ce qui signifie
que c’est l’histoire d’une région non-
viable en constante croissance,
entourée par une campagne de plus
en plus exploitée...” - Derrick Jensen
civilisation
Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
UN MAL NOMMÉ CIVILISATION - I
Origine et non durabilité
Hagouchonda, juillet 2008.
LA CITÉ
Comme son nom l’indique (du latin:
civitas,-tatis la cité ; civis,-is le citoyen) la
civilisation est une affaire de ville, de cité.
Et qu’est-ce qu’une cité si ce n’est un
village exagérément grand par rapport à la
capacité de charge de son environnement ?
Pour soutenir une telle concentration
d’humains, il faut donc trouver une astuce
pour tricher et contourner les lois de la
nature. Pour ce faire, la civilisation utilise
l’agriculture. Un procédé qui consiste à
raser l’écosystéme existant et à le
remplacer par une seul plante ou plus
exactement une poignée de plantes
apparentées. Ce procédé provoque la
dégradation du sol et son érosion
progressive.
MlJLTIPLICA'nON
Au début, le civilisé parvient à produire
d’avantage de nourriture qu’il n’en n’avait
besoin. Il put ainsi constituer des réserves
et commercer avec les éleveurs nomades et
les tribus sauvages. Ce surplus permit aussi
une spécialisation des humains civilisés
(charpentiers, scribes, etc.). Mais
rapidement, comme c’est toujours le cas
quand un animal est en présence d’une
abondance alimentaire, le civilisé s’est
multiplié et les surplus ont fondu. Il dut
alors intensifier et étendre toujours
d’avantage son astuce. Au prix de toujours
plus d’effort et de travail. Ainsi commença
la grande fuite en avant de la civilisation.
GIJKUUK
Il s’ensuivit une guerre effrénée contre
l’écosystéme, menée par l’homme civilisé
pour augmenter sa production. Il doit
toujours augmenter les surfaces agricoles.
Il doit constamment retourner la terre pour
empêcher la nature de restaurer les terres
de la civilisation. Par
dévastées. Cela demande un
investissement important de temps mais
surtout d’énergie. Dans un premier temps,
ce travail fut effectué à la main. Puis on fit
appel à la force animale pour éventrer la
terre. Il fallu alors nourrir et entretenir ces
bêtes, ce qui impliqua un surplus de
travail. On creusa aussi des canaux
d’irrigations et de drainage qu’on dut
entretenir. Eventuellement, on remplaça
les animaux par des tracteurs, des
moissonneuses, etc. On créa des engrais
chimiques pour compenser artificiellement
à la dégradation du sol. Augmentant de
plus en plus la complexité de la civilisation.
DKCKOISSANCK
Cet accroissement de complexité a bien sur
un coût, il signifie toujours d’avantage de
gens attachés à la gestion de cette
complexité et à des tâches autres que la
production d’aliment. Cela signifie qu’au
fur et à mesure que cette complexité
augmente, le retour sur l’investissement
diminue jusqu’à ce que le retour devienne
négatif. Ce phénomène est connu sous le
nom de «Loi des retours décroissants», et
cela implique qu’inévitablement toute
civilisation doit s’effondrer quand elle
atteint ce point de développement. A ce
stade, un problème somme toute banal
peut les anéantir. Car le seul moyen de
résoudre les problèmes dans une
civilisation implique un accroissement de la
complexité.
ciuinmii
Toutes les civilisations ont disparu à cause
de ce phénomène de retour décroissant. La
civilisation actuelle ne s’est pas encore
effondrée lorsqu’elle manqua de bois et
devint incapable d’augmenter sa
production alimentaire parce que deux
évènements lui permirent de continuer son
Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
stratagème agricole et énergétique. Elle
découvrit l’Amérique et passa à l’âge du
carbone en se tournant vers le charbon.
L’Amérique lui apporta de nouvelles terres
mais aussi de nouvelles plantes
domestiques ce qui mit fin à des épisodes
de famine récurrents. Le charbon remplaça
le bois qui manquait cruellement. Devant
les coûts croissants du bois et la densité
énergétique plus grande du charbon. On
finit par se résigner à l’utiliser de plus en
plus. Le charbon étant disponible en
quantité et à bas prix il devint le moteur
de la première révolution industrielle, qui
conduisit à une explosion de la complexité
comme jamais auparavant et poussa plus
loin l’explosion démographique et la fuite
en avant des civilisés et la destruction des
écosystèmes.
IIYDUOCAUBIJUKS
Puis arriva le pétrole, dont l’énergie était
encore plus concentrée que celle du
charbon, tout en étant infiniment plus
versatile. Et la fuite en avant continua de
plus belle, augmentant toujours d’avantage
la complexité. Une complexité
exponentielle alimentée par la
consommation toujours plus grande
d’énergie fossile. Or voilà que les énergies
fossiles sont non renouvelables (sauf sur
des temps géologiques). Et il se trouve que
nous avons atteint à toute fin pratique le
point où la moitié du pétrole a été pompé.
Il en résulte selon une loi géologique
implacable que la production va
progressivement décroitre, ce qui va
obliger la civilisation à trouver une
nouvelle astuce pour continuer sa fuite en
avant. Et ce, très, très rapidement. Le gaz,
le charbon, et l’uranium sont dans une
situation comparable, leurs pics
d’extraction suivront sous peu. En
Amérique du nord, le gaz est déjà en déclin
et on doit en importer à grand frais
(accroissement de la complexité).
PIC PK'rKOLlKR
Le pétrole et les énergies fossiles (incluant
l’uranium) est un parfait exemple de la loi
sur les retours décroissants. Au début, on a
pompé le pétrole facile, il sortait même
tout seul de terre. Pour chaque joule
investie on en récupérait 100 voir plus.
Mais au fil du temps, ces gisements
s’épuisèrent et on se tourna vers des
sources plus difficiles et il fallu investir
plus d’énergie pour le récupérer. On passa
à 50:1 puis avec le temps à 10:1. On en
arriva à l’extraction des sables bitumineux
dont le retour sur investissement est très
faible 3:1 à 2:1 tout au plus.
NKCROCARBlJRAN'rS
Récemment, sous un prétexte écologique,
on se tourna vers les agrocarburants et le
retour sur l’investissement devint négatif.
Car l’agriculture est un procédé qui
consiste depuis longtemps à transformer
une importante quantité d’énergie non-
alimentaire en une petite quantité
d’énergie alimentaire. Cela à commencé
quand la force animale a remplacé la force
humaine. Les boeufs mangent plus
d’énergie qu’ils permettent d’en produire,
ils importaient pour ainsi dire l’énergie des
prairies incultes par le biais du foin mangé
par les bêtes. L’avènement du tracteur et
de l’énergie fossile creusa l’écart, si bien
qu’aujourd’hui on en est à 1 joule récoltée
pour 10 dépensées. Mais la production a
augmenté, l’agriculture est un système
consistant à utiliser la force brute, au
contraire de l’horticulture. Les pesticides,
les herbicides, les engrais, les machines,
tous dépendent d’une consommation
incommensurable d’énergie fossile. Non
seulement l’agrocarburant est-il un retour
négatif sur l’énergie mais pour cette raison
aussi d’un point de vue environnemental.
OLRIJVAÏ
Le piège des rendements décroissants se
referme donc sur la civilisation. Mais cette
civilisation, contrairement aux autres, sera
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Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
la dernière car elle a épuisé toute les
ressources minérales accessibles par des
moyens humains. Les ressources qui
nourrissent la bête immonde, ne peuvent
être obtenues qu’aux frais d’un complexe
industriel devenu insoutenable. Les sols
épuisés, minéralisés, morts et infertiles ne
pourront plus produire assez de nourriture
pour relancer une civilisation. Il faudra des
millénaires pour que les sols redeviennent
fertiles. C’est la théorie d’Olduvaï dans
toute sa beauté.
CLIMA'r
Par ailleurs, pour améliorer la situation, les
dommages à l’environnement et au climat
feront disparaître les conditions ayant
permis l’émergence de l’agriculture.
D’autant plus, que le réchauffement du
climat va recevoir un coup de fouet après
l’effondrement de la civilisation par la
suppression de l’Effet de voile planétaire.
L’intense activité industrielle et la
combustion des énergies fossiles relâchent
dans l’atmosphère de fines particules
appelées aérosols. Ces aérosols provoquent
la réflexion d’une part importante du
rayonnement solaire vers l’espace. Dans les
années 1970 on assista à un refroidissement
du climat qui provenait de cet effet. Mais
plus tard, les quantités de C02 dans
l’atmosphère permirent à l’effet de serre
de supplanter l’effet de voile.
KFFOXDUKMKX'r
Qu’adviendra-t-il alors ? La civilisation
implosera et les civilisés avec elle, il n’y a
aucun doute là-dessus. La destruction des
écosystèmes étant si grande, leurs
capacités de charge est bien plus faible que
celles qui existaient au néolithique, lorsque
tout ça débuta. Par conséquent, la
population humaine, comme toute
population animale qui dépasse la capacité
de son environnement à le nourrir, crèvera
de faim et de maladie. Jusqu’à ce que le
nombre d’humains soit approprié aux
ressources. En d’autre termes, au moins
95% de la population mondiale est
- 9 -
condamnée à brève échéance. Les chances
de survie décroissant dramatiquement avec
la densité de population. Les 5% seront
presque exclusivement ceux que le civilisé
appelle avec mépris et dégoût: «sauvage»,
«barbare» ou «primitif».
Vert fit Noir
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Vl^^e.Ÿy\£■nt
Qu'est-ce que le réensauvagement (rewilding en anglais) ?
Ce terme, Réensauvagement (Rewilding) , est relativement
nouveau pour moi. La première fois que je l'ai lu quelque
part, c'était il y a moins d'un an. Je crois que je faisais
une recherche sur l'anarchisme vert quand je suis tombé
dessus. En fait, c'est à peu près en même temps aussi que
j'ai lu pour la première fois à propos d' 'anarchisme vert',
d' 'anti-civilisation', d' ' anarcho-pr imitivisme ' , et ainsi
de suite. Par Misko.
En en apprenant plus sur le
‘réensauvagement’ je me suis aperçu que
ça définissait assez bien ce que je faisais
depuis un bon petit bout de temps.
En voici donc quelques définitions, que
j’aime bien:
'Wiltepn Lç^ne.n
Extrait de, “WHAT DOES REWILDING
MEAN?”, chez ‘The College of Mythic
Cartography”
“...Réensauvagement, dans le sens que
les ‘cartographes mythiques’ (mythic
cartographers) et animistes de divers
milieux r utilisent, signifie une
renaissance et un retour constants
aux valeurs et technologies de la
Famille, du Village, et de la Terre.
Pour moi, cela veut réellement dire
vivre la Belle Vie (the Good Life).
Cela veut dire savourer et prioriser la
nourriture, la famille, le travail
éthique, les partenariats avec la vie
sauvage. Cela veut dire de prendre
responsabilité pour notre ascendance,
cela signifie prendre le temps de
s’attrister pour ce que nous avons, et
de célébrer ce que nous avons perdu.
Ça veut dire fini les “oublie ça, passe
à autre chose”. Ça veut dire
s’éloigner de la vie que nous ne
voulons plus vivre, et choisir
maintenant la vie que nous voulons
vivre. Ça veut dire de suivre nos
coeurs.
La ‘Renaissance du Réensauvagement’
décrit l’engagement toujours
grandissant de tellement de gens à
recréer et à réinventer les traditions
perdues de la Famille, du Village, et
de la Terre. Nous ne voyons pas de fin
à ce processus; les êtres humains ont
toujours eu à renouveler leur
engagement à vivre en beauté et
d’une manière qui fonctionne.
H importe seulement que nous
commencions. ”
C^rttn Anç^rckvj ïnj^Q
‘Rewilding’. Auteur inconnu:
“Pour la plupart des anarchistes
verts/ primitivistes et anti-
civilisation, le réensauvagement et la
reconnexion avec la terre est un
projet de vie. Ce n’est pas limité à la
compréhension intellectuelle ou à la
pratique de techniques primitives,
mais au lieu de cela, c’est une
profonde compréhension de toutes les
manières possibles avec lesquelles
nous sommes domestiqués, rompus,
et séparés de nous-mêmes, des
autres, et du monde, et de l’énorme
travail quotidien à redevenir
complet. Le réensauvagement a une
composante physique qui implique le
recouvrement d’habiletés et le
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Vert fit Noir
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développement de méthodes pour une
coexistence viable, incluant comment
nous nourrir, nous abriter, et nous
soigner avec les plantes, animaux, et
les matériaux qui se trouvent
naturellement dans notre biorégion.
Cela inclut aussi le démantèlement
des manifestations, dispositifs et
infrastructures physiques de la
civilisation. Le réensauvagement a
une composante émotionnelle, qui
implique de nous guérir nous-mêmes
et les uns les autres des blessures
vieilles de 10 000 ans qui sont
profondes, d’apprendre comment
vivre ensemble en communautés non-
hiérarchiques et non-oppressives, et
de déconstruire les principes
domestiquant dans nos patterns
sociaux. Le réensauvagement
implique de prioriser l’expérience
directe et la passion à la médiation et
l’aliénation, de repenser chaque
dynamique et aspect de notre réalité,
de nous connecter avec notre fureur
sauvage à défendre nos vies et à
combattre pour une existence
libérée, de développer notre
confiance en notre intuition et d’être
plus connectés à nos instincts, et de
regagner l’équilibre qui a été
littéralement détruit après des
milliers d’années de contrôle et de
domestication patriarcaux. Le
réensauvagement est le processus
pour devenir non-civilisé. ”
Tfu. Antkrpjjtk. 'HetWerk.
“Réensauvager veut dire de
réensauvager non seulement notre
corps et notre pensée, mais, encore
plus important, nos relations - de
reconstruire la toile de relations
mutuelles qui lie non seulement le
monde humain, mais qui lie aussi le
monde plus qu’humain. La première
étape dans ce sens est de créer la
tribu. Les tribus sauvages étaient des
familles; aujourd’hui, la civilisation
essaie de s’affirmer comme étant une
grande famille, mais elle est
dysfonctionnelle. La tribu est la
famille originelle, vivant libre et
saine sur la terre. ”
Parfois je nomme ce processus “Ré
humaniser”, étant donné que les humains
sont fondamentalement ’sauvages’,
‘naturels’, et ainsi de suite. En majorité,
ce que je vois marcher autour de moi dans
cette civilisation ce sont des cyborgs, pas
des humains. Tout ce qui reste de beauté
dans cette culture, est ce qui peut rester
d’humanité, de sauvage, ou de naturel en
chacun(e).
Je pense aussi que plus une personne se
réensauvage, se réhumanise, et donc plus il
(elle) se ré-enracine avec sa terre, plus elle
peut, entre autres choses, protéger
efficacement sa Terre/Famille.
Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
H(^i, icQute^z-ŸYUfi
Un poème d'Ariel Boucher
Aujourd’hui, moi, la terre
Entendez mes prières
Cessez de me nucléariser
De me souiller me bombarder
Depuis votre naissance
Vous allaite, vous nourrit
Vous accueille dans mon lit
Mon empreinte votre espérance
Vous offre les fruits de la vie
Vous désaltéré à mes rivières
Dans mon ventre dans mes chairs
Vous me violez. Mon agonie
Vous parfume de mes odeurs
D’arômes poivrés salés
Vous ravie les yeux de couleurs
Vous m’ensevelissez d’horreurs
Pour vous plaire me fais neige
Ou en plages de sable blanc
Dansez en joyeux cortège
Buvez mon vin rouge ou blanc
Vous repoussez au loin mes eaux
Demain mes champs seront béton
Mes arbres éclatés en morceaux
Plus qu’un désert. Adieu moissons
De l’autre coté de l’océan
Vous m’affamez, vous m’assoiffez
Sans vergogne mon or mon argent
Mes blessures s’écoulent de mes flancs
Je suis votre mémoire
Vos haines vos peurs vos victoires
Cessez de me martyriser
Vous restez sourds à mes prières
Je vous porte vous supporte
Vous voulez conquérir le ciel
Que le diable vous y transporte
Je suis lasse. J’ai sommeil
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Vert fit Noir
Numéro 1.1- Eté 2009
De la neutralité de la technologie
Dans l'esprit de beaucoup, la technologie n'est qu'un outil
qu'on peut utiliser pour faire le bien ou le mal mais qui en
soit est neutre. Cette neutralité justifie la technologie si
le système en place l'utilise positivement. Cet article de
Jesse Cross-Nicker son paru dans Green Anarchy #24 montre que
ce n'est pas le cas. Traduction par Mouton sauvage.
Nous vivons une époque de changements
extraordinairement rapides dans presque
tous les champs de l’existence humaine.
Ces changements sont générés
principalement par les développements des
systèmes technologiques et industriels qui
ont largement altéré la façon dont nous
ressentons le temps, l’espace, les autres et
le monde naturel. C’est comme si rien ne
demeurait intouché par cette révolution
technique : paysages et fleuves sont
effacés et reconstruits avec des machines
lourdes, de l’acier et du béton ; les
biotechnologies ont mis les éléments de
base la vie sous notre contrôle ; la
connaissance telle que nous l’entendions
est presque complètement remplacée par
l’information qui transite à travers des
réseaux de fibres optiques et d’ondes
radios qui connectent ordinateurs,
télévisions et téléphones mobiles. Partout,
les gens et l’environnement sont
profondément affectés par cette nouvelle
vague colonialiste qu’est « la liberté du
commerce », un euphémisme, et qui
répand ces technologies dans tous les coins
de la planète. Chaque mètre carré sur
terre est maintenant colonisé et
revendiqué par la juridiction des états ou
entreprises capitalistes.
Les techno-optimistes, généralement issus
des classes privilégiées de cette nouvelle
société globale, considèrent ces
changements comme le « Progrès ». Les
idéologues politiques de la gauche et de la
droite voient le développement industriel
comme solution à tous les problèmes, ne
différant que dans la voie qu’ils
prendraient pour bâtir un monde
complètement rationalisé et mécanisé. A
l’intérieur des cercles intellectuels
raffinés, la position la plus radicale
acceptable est que quelques technologies
modernes ne sont pas nécessaires ou pas
désirables, et que l’industrialisation
globale se fait d’une manière qui nuit à
l’environnement et à beaucoup de gens.
Les activistes professionnels et groupes
commerciaux exhibant des slogans comme
« Commerce équitable et non commerce
libre » vendent l’agriculture biologique, le
travail progressiste, les législations
environnementales et commerciales
comme des correctifs aux excès de la
globalisation.
Ces réformistes plein d’espoir tentent de
contribuer à la création d’une forme plus
gentille, plus douce du capitalisme
industriel global. Il est certainement mieux
que les travailleurs soient bien payés et
que la production se fasse dans des
conditions de sécurité, de santé et d’une
manière écologiquement soutenable II est
certain que les producteurs de café
d’Amérique latine méritent des prix
équitables pour leurs produits, mais qu’est-
ce qui les force à produire quoi que ce soit
pour le monde occidental ? Peut-on
imaginer un monde qui ne soit pas divisé
entre un sud pauvre et un nord riche ? En
tant que personnes ayant directement
bénéficié de l’exploitation et de
l’appauvrissement du Tiers Monde durant
toute notre vie, pouvons-nous nous
imaginer vivant dans un tel monde ? Quels
intérêts sert la technologie moderne ? Et
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qui doit en payer le prix ? La grande
majorité des intellectuels occidentaux
rechignent à considérer de telles questions.
Je présente cet essai comme une tentative
de gratter la surface de ce territoire
profondément inconfortable.
L’obstacle le plus difficile à surmonter dans
la recherche d’une critique de la
technologie vient d’attitude communes,
académiques ou non. L’approche standard
de la technologie est de la considérer
comme politiquement neutre. Selon ce
point de vue, le développement
technologique est dérivé des progrès de la
science qui est elle-même vue comme une
méthode pour obtenir des « vérités
objectives, libres de valeurs morales qui
émergent d’un processus déductif basé sur
des hypothèses » (Ihde 1993 :72). La
science nous donne des connaissances qui
sont simplement mises en application par
la technologie. Comme elle est basée sur
des vérités objectivement vérifiées, la
technologie est moralement neutre et peut
être utilisée pour améliorer la vie des gens
partout, quel que soit leur environnement
économique et culturel.
Selon cette logique, le processus industriel
moderne ne représente rien de
qualitativement nouveau ; il ne fait
qu’améliorer et rationaliser les métiers et
techniques du passé. Les humains ont
toujours utilisé la technologie, de la hache
de pierre taillée à la fission nucléaire et
aux manipulations génétiques. Ce genre de
considération rend la technologie
essentiellement insensible à la critique vu
qu’elle est vue comme naturellement
intrinsèque à l’espèce humaine. S’opposer
à la technologie revient à s’opposer à
l’humanité. Il y a des bonnes technologies,
des meilleures technologies, et tout mal
résultant de leur utilisation est dû à une
mauvaise application ou une conception
défaillante. La technologie elle-même,
ainsi que la science qui la sous-tend ne sont
jamais responsables. John Zerzan, peut-
être le deuxième luddite contemporain
vivant aux USA, Ted Kaczinsky étant le
premier, décrit cette logique dans une
conférence à l’université Stanford :
La technologie prétend être neutre,
un simple outil, sa valeur et sa
signification complètement
dépendante de la façon dont elle est
utilisée. De cette manière elle cache
sa finalité en camouflant ses
intentions. S’il n’y a aucun moyen de
comprendre ce qu’elle est en terme
d’essence, de logique interne,
d’enchâssement historique ou d’autre
dimension, alors ce que nous
nommons technologie échappe au
jugement...
Aujourd’hui, les gens qui disent que
ce n’est qu’un simple outil pensent
vraiment que c’est une chose
positive. Mais ils veulent être un peu
plus prudents à ce sujet. Si vous dites
que c’est neutre alors vous évitez de
devoir prouver l’affirmation de sa
positivité. (Zerzan 2002 :43).
La neutralité de la technologie est
supportée par un double argument : tous
les humains utilisent la technologie et les
sciences que nous utilisons pour les
améliorer sont moralement neutres. Ces
deux affirmations peuvent être réfutées, et
en le faisant nous progressons vers une
pensée critique de la technologie. Il n’est
pas correct de dire que les outils utilisés
par les peuples non modernes du passé et
du présent ne sont que des versions
primitives et brutes des technologies
modernes. Ils sont quantitativement et
qualitativement différents. Marin
Heidegger comparait le barrage hydro-
électrique moderne avec le moulin à vent
préindustriel :
Non: ses ailes tournent bien au vent
et son livrées directement à son
souffle. Mais si le moulin à vent met
à notre disposition l’énergie de l’air
en mouvement, ce n’est pas pour
l’accumuler. ..La centrale électrique
est mise en place dans le Rhin. Elle le
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somme (steiit) de livrer sas pression
hydraulique, qui somme à son tour les
turbines de tourner...Dans le domaine
de ces conséquences s’enchaînant
l’une l’autre à partir de la mise en
place de l’énergie électrique, le
fleuve du Rhin apparaît, lui aussi,
comme quelque chose de
commis. ..C’est bien plutôt le fleuve
qui est muré dans la centrale.
(Heidegger 1977:12.. 14)
La nature est donc transformée en une
“réserve permanente” à disposition des
consommateurs industriels modernes. Et la
vitesse à laquelle cette transformation
s’effectue a accéléré. En Inde aujourd’hui,
pour citer un exemple parmi beaucoup, la
modernisation implique la construction
d’un des plus grands projets de barrages de
l’histoire:
Il envisage la construction de trois mille
deux cents barrages. qui va transformer le
fleuve Narmada et ses quarante-et-un
affluents en une série de réservoirs. Il va
altérer l’écologie de tout le bassin fluvial
et affecter la vie d’environ vingt-cinq
millions de gens qui vivent dans la vallée,
et submerger quatre mille kilomètres
carrés de forêts vénérables, des centaines
de temples ainsi que des sites
archéologiques datant du paléolithique
inférieur. (Roy 2001: 39)
Il est clair que la technologie moderne
affecte le monde à une bien plus grande
échelle que les pratiques supposées
primitives. Les gens (et tous les
organismes) modifient toujours
l’environnement dans lequel ils vivent,
mais le pouvoir de l’industrie moderne de
raser des forêts, d’endiguer des fleuves, de
miner le sommet des montagnes, d’altérer
la chimie du sol, de l’eau et de l’air,
d’affecter le régime pluvial, d’augmenter
la température et de mener un nombre
incalculable d’espèces à l’extinction
excède largement les dommages causés par
la plus destructrice des cultures non
modernes. Avant la révolution industrielle.
« les efforts des hommes, même les plus
puissants, étaient minuscules comparés à la
taille de la planète; l’Empire Romain ne
signifiait rien pour l’Arctique ou
l’Amazone. Mais maintenant, le style de vie
des gens dans une partie du monde est en
train d’affecter chaque centimètre carré et
chaque heure du globe » (McKibben
1989:46). Les changements amenés au
monde par la technologie moderne
excèdent largement en amplitude et en
portée toute autre entreprise humaine.
Toutes les cultures altèrent leur
environnement mais encore jamais elles
n’ont produit des si larges effets
permanents à un niveau global. La capacité
de l’industrie moderne de modifier
l’environnement considérablement de
manière quantitative la distingue des
pratiques non modernes au point qu’on ne
peut plus les considérer comme
semblables.
Les différences qualitatives entre ces deux
types de technologies sont également très
fortes. Contrairement aux ouvriers (ou
leurs remplaçants cybernétiques) sur une
chaîne de production industrielle, les
membres des sociétés « primitives » sont
capables de fabriquer toutes les choses
dont ils ont besoin au niveau individuel,
familial ou villageois. Ils cultivent ou
collectent leur propre nourriture, cousent
leurs propres vêtements et façonnent des
outils à partir de matériaux naturels. Les
produits que ce genre de société produit
sont conçus en fonction de leur culture
régionale en adéquation avec les besoins
spécifiques et les désirs des gens vivant
dans leur propre environnement local. Ces
technologies permettent aux gens de vivre
de façon autonome, sans état et égalitaire,
ainsi que d’exprimer une vaste diversité
culturelle et linguistique.
Par contraste, la technologie moderne
mobilise et coordonne littéralement des
milliards d’individus sur plusieurs
continents dans des systèmes qui
fabriquent et distribuent des lignes de
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produits industriels identiques. Du point de
vue moderne, une variation est considérée
comme un défaut. La production locale,
unique et à petite échelle est remplacée
par une chaîne d’assemblage globale. Les
ouvriers ne fabriquent plus des biens pour
eux-mêmes ou leur famille; ils peinent dans
des mines, des usines, des bureaux et des
écoles pour permettre le fonctionnement
de la machine industrielle. Autant l’ouvrier
que le produit qu’il fabrique sont
dépersonnalisé et réduits à un nombre
monétaire dans la grande équation
économique. Comme Heidegger l’aurait
dit, même l’être humain a été transformé
en “réserve permanente”. Au début de ses
écrits, Karl Marx a appelé ce processus
aliénation et l’a décrit en des termes qui
mettent en cause non seulement le
capitalisme mais aussi l’industrialisation:
U augmentation de la valeur dans le
monde matériel est directement
proportionnelle à la baisse de valeur
humaine. Le travail ne produit pas
que des denrées. H se produit, ainsi
que r ouvrier, dans des proportions
similaires aux denrées qu’il produit
généralement.... (Marx 1994: 59.. 61)
Faisant écho à Marx et Heidegger, Michel
Foucault suggérait que « les institutions
modernes soumettent les gens à une
surveillance et une discipline constantes
conçues pour atteindre la normalité, c’est-
à-dire conçues pour transformer les êtres
humains en ‘bio-force’ adaptée aux besoins
des objectifs totalitaires du système
technologique » (Zimmermann 1990:203).
Les écoles, les prisons et les usines utilisent
des méthodes de contrôle strict du temps
et de surveillance pour garantir
l’intégration sans failles du travail humain
et des mécanismes industriels. Ces
techniques « établissent des rythmes,
imposent des occupations, règlent les
cycles répétitifs. Mais elles tentent
également de garantir la qualité du temps
utilisé: supervision constante, pression des
superviseurs, élimination de tous les
éléments perturbateurs ou sources de
distraction... » (Foucault 1977:149. .150).
Grâce aux technologies pharmaceutiques,
la production de bio-force est maintenant
assistée par des drogues qui garantissent la
docilité et la tranquillité des travailleurs et
des étudiants.
Plutôt que de travailler dans un cadre
naturel pour atteindre ses objectifs,
l’industrie moderne opère à l’intérieur
d’une matrice de technologies, processus
et environnements construits. La
technologie est de plus en plus impliquée
dans la production et la maintenance de
technologie. C’est vrai de l’échelle
moléculaire à l’échelle globale. Les
ordinateurs et les communications par
satellite coordonnent les déplacements de
personnes, produits et matériaux, pendant
que les laboratoires produisent des
nouveaux produits chimiques et des
nouvelles formes de vie qui deviennent les
intrants de nouvelles productions. La
technologie utilise des matériaux et des
produits chimiques qui se trouvent nulle
part dans la nature. Les produits
synthétiques comprennent les intrants
nécessaires et les sous-produits indésirables
de tout processus industriel. Plusieurs de
ces produits chimiques endommagent
l’environnement. Plusieurs ne sont pas
biodégradables. L’économie des peuples
non modernes impliquait l’utilisation de la
pierre, des produits animaux, du bois et
des fibres végétales et rejetait les mêmes
matériaux lorsqu’ils n’étaient plus utilisés.
Les industries d’aujourd’hui produisent des
plastiques, des CFC, des pesticides, des
déchets nucléaires et du maïs roundup
ready, rejettent des déchets dans l’eau et
l’air ou les enterrent dans des décharges
plus grandes que nos merveilles
architecturales.
La technologie industrielle n’a pas amélioré
les techniques du passé. Elle les a
remplacées par quelque chose de
quantitativement et qualitativement
différent. En reconnaissant cette
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dichotomie nous pouvons juger la valeur et
la logique de la technologie moderne sans
accuser en même temps les économies non
modernes. Nous pouvons condamner la
bombe atomique mais laisser de côté l’arc
et les flèches. Nous pouvons être écoeurés
par l’idée de nourriture génétiquement
modifiée et en même temps admirer la
beauté et la productivité de notre potager.
En reconnaissant que ces deux formes de
technologie agissent dans, et engendrent,
des contextes économico-politiques aussi
radicalement différents, nous pouvons
affirmer que la technologie n’est pas
neutre, mais chargée des valeurs de la
culture qui l’a créée. La globalisation de la
technologie industrielle moderne ne
représente pas le « développement » des
cultures du tiers-monde mais leur
destruction, leur soumission et leur
remplacement par la culture coloniale
occidentale. Arundhati Roy dit de ce
processus qu’il est « quelque chose
similaire à une guerre civile...qui serait
déclarée au nom du développement » (Roy
2001:4).
Alors où se positionne la science dans tout
cela ? Est-elle neutre et objective comme
beaucoup de gens le prétendent ou est-elle
chargée de valeurs culturelles ? Est-ce que
les connaissances scientifiques et les
méthodes utilisées pour les produire sont
impliquées dans les problèmes politiques
des technologies ? Ou est-ce que le savoir
lui-même est innocent et qu’il ne prend
une valeur qu’au moment de son
application ? Est-ce qu’il y a une ligne de
démarcation entre les sciences « pures » et
appliquées ? Vu la quantité
d’établissements scientifiques financés par
des entreprises privées et des états ayant
un intérêt dans la technologie, une telle
ligne est difficile à définir. Le lien entre
science et technologie est suffisant pour
justifier des soupçons sur l’innocence de la
science, mais il n’est pas suffisant pour
vraiment comprendre son rôle dans la
colonisation et la destruction écologique en
cours sur notre planète. Le gestalt
technologique était préfiguré dans les
méthodes et les hypothèses de la science
dès ses débuts.
Francis Bacon, qui a établi l’essentiel des
fondations de la science expérimentale
moderne, avait pour maxime que « la
connaissance c’est le pouvoir ». La science,
dans la tradition baconnienne, n’était
jamais pure, mais toujours liée à des
applications possibles, toujours faite pour
contrôler et dominer la nature. Au
vingtième siècle, des féministes comme
Sandra Harding ont commencé à relever le
coté sexué et paternaliste de cette
tradition. « En résumé, l’essor des sciences
modernes était lui-même un mouvement
dans le contexte baconnien et masculin
d’une agression contre la nature trahie
dans les métaphores de la science ‘twisting
the tail of nature’ ou même dans
l’utilisation de métaphores de viol, de
Bacon jusqu’à une acceptation
contemporaine par des prix nobels » (Ihde
1993:70-71) La nature ne devient pas une
réserve permanente depuis la mise en
oeuvre de la technologie, elle est déjà
définie ainsi intellectuellement à
l’intérieur des structures expérimentales.
La méthode scientifique se base sur
l’extraction d’un phénomène hors ne sont
contexte naturel et holistique et la
tentative de le répliquer dans les
conditions réductrices du laboratoire. La
forme de l’expérimentation ne se base pas
sur l’observation de la nature mais sur son
interférence et son contrôle.
La brique suivante dans la fondation de la
science moderne a été posée par
Descartes. Lorsqu’il a écrit « je pense donc
je suis », il a placé le processus de pensée
rationnelle (européenne) au centre
subjectif de l’univers. Toute autre chose
devenant un satellite en orbite autour de
l’esprit occidental. Les animaux et les
peuples non occidentaux, dont on
présumait qu’ils ne possédaient pas la
raison, étaient ainsi dénués de leur propre
représentativité et de leur subjectivité.
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leurs vies n’ayant de sens qu’en relation
avec la conscience européenne. Rien dans
le monde naturel n’était de justification
inhérente par son existence propre. La
fonction de chaque chose devait être
définie et contrôlée par l’homme rationnel.
Derrick Jensen a judicieusement décrit la
nature exploiteuse de la philosophie de
Descartes et la place à la racine de la
science et de la technologie moderne:
Même si sa philosophie n’était pas
une justification si facile pour
l’exploitation, sa recherche était
fatalement imparfaite avant même
qu’elle commence...En substituant
l’illusion de la pensée désincarnée
par l’expérience (la pensée
désincarnée étant bien sûr impossible
pour quelqu’un possédant un corps),
en substituant des équations
mathématiques aux relations du
vivant, et plus important, en
substituant le contrôle, ou la
tentative de contrôle, à la
participation complète à la nature
sauvage et aux processus
imprévisibles du vivant. Descartes est
devenu le prototype de l’homme
moderne. (Jensen 2004: 10)
Armé de ces principes philosophiques,
l’homme n’a pas besoin de mettre un
barrage sur le fleuve pour en faire une
réserve permanente. Il l’a déjà fait dans sa
conception du fleuve.
Donc la science aussi est complètement
chargée de valeurs culturelles. Les vérités
universelles que nous révélent
l’expérimentation ne sont pas universelles
du tout, mais des inventions et des
abstractions produites et répliquées dans
un environnement technologique construit.
La science expérimentale ne révéle pas la
vérité: elle la fabrique. Il y a un fort
corollaire entre le laboratoire et la
fabrique. Dans les deux environnements,
les travailleurs mettent à exécution des
procédures répétitives dont le but est de
produire des résultats identiques d’une fois
à l’autre. Le savoir est transformé
d’expériences et d’histoires vécues en
abstractions mécaniques répliquables. Des
machines qui observent, enregistrent,
stockent et transmettent des données ont
remplacé les sens comme source de vérité.
C’est seulement dans le contexte de cet
environnement construit, entouré que nous
sommes par des ordinateurs, des horloges,
des télévisions et autres machines de
l’information que cette vérité a un sens.
Nous nous sommes en fait construit le
monde imaginaire abstrait que pensé par
l’esprit désincarné et rationnel de
Descartes. De plus en plus de nos
interactions sont faites avec des
automates. Notre environnement est de
plus en plus le produit de pensées
rationnelles.
En constatant que la technologie et la
science ne sont pas neutres, nous pouvons
accuser la technologie, et l’état d’esprit
duquel elle émerge, d’être la cause
majeure de la pauvreté, de la dégradation
de l’environnement et de la perte de la
diversité culturelle et biologique qui pèsent
sur les pays du sud. La technologie n’est
pas la solution aux problèmes globaux,
mais leur cause. Sa logique est exploiteuse,
centralisatrice et colonialiste. Pour
formuler une réponse adéquate aux
problèmes auxquels la planète doit faire
face, nous devons penser en dehors de
confins du raisonnement technologique
moderne et formuler une compréhension
de et une relation complètement
différente avec le monde et les gens autour
de nous. Aussi longtemps que nous
continuerons à réduire la nature et la
société à des réserves permanentes, nous
maintenons sur elles un modèle arbitraire
qui ne convient pas du tout, et les résultats
sont souvent désastreux. Notre nouveau
gestalt doit en être un qui nous intègre aux
processus naturels, pas leur reconstruction
pour nos besoins.
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Références citées
Foucault, Michel (1977) Discipline and
Punish: The Birth of the Prison. New York:
Random House.
Heidegger, Martin (1977) The Question
Concerning Technology and Other Essays.
New York: Harper and Row.
Ihde, Don (1993). Philosophy of
Technology. New York: Parangon House.
Jensen, Derrick (2004): A Language Older
Than Words. White river Junction, VT:
Chelsea Green.
Marx, Karl (1994). Selected Writings. Ed.
Simon Lawrence. Indianapolis: Hackett
Publishing.
McKibben, Bill (1989). Then End of Nature.
New York:Doubleday.
Roy, Arundhati (2001). Power Politics.
Cambridge, MA: South End Press.
Zerzan, John (2002). Running on Emptiness:
The Pathology of Civilization. Los Angeles:
Ferai House.
Zimmermann, Michael (1990). Heidegger’s
Confrontation with Modernity. Indianapolis:
Indian University Press.
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